Les rencontres « sport et management » de TPS Conseil
Rencontre exceptionnelle du 1er juillet 2014, Fédération Française de Tennis, Stade Roland Garros
«Sport et stratégies de formation dans les entreprises et les territoires, réponses adaptées ou effets de mode ? »
La rencontre entre le sport et la formation s’impose pour beaucoup de responsables comme naturel pour conforter un modèle inspirant d’engagement personnel, de dépassement de soi et de performance face à des managers, des organisations et des équipes en quête de repères. Face à des attentes de plus en plus pointues et diverses le sport a depuis enrichi sa proposition de valeur pédagogique. A l’occasion d’échanges opérationnels avec des sportifs, experts et dirigeants nous vous proposons d’optimiser vos stratégies de formation autour du sport.
Avec l’avènement du sport 2.0, stimulée par les nouvelles logiques collaboratives (mécénat de compétences, gestion des talents, lien social,…) la formation a affiné ses objectifs pédagogiques et s’est emparée de la « ressource sport ». Les fédérations sportives et les territoires ne sont pas en reste. Ils enrichissent en effet leur offre en intégrant un contenu pédagogique ou des équipements sportifs à destination des entreprises.
Comment associer au mieux aujourd’hui sport et formation pour accompagner les attentes de la génération Y, le développement des compétences et l’émergence de nouveaux modèles managériaux ? Pour quelle efficacité ? Quels effets de levier pour la RSE, le bien être individuel et collectif, la conduite du changement ou la culture d’entreprise ? Enfin, quelles sont les enjeux et les opportunités à saisir pour les territoires et les acteurs du sport ?
Les intervenants : M. Jean-Luc Sadik, Président de TPS Conseil, fondateur des Trophées Sport & Management, : Mme Virginie Despres, HR Training & Back Office Manager Adidas France, lauréate prix Entreprise des Trophées Sport & Management 2014, et des Trophées du Responsable de formation 2013 M. Alain Solves, DTN Adjoint Fédération Française de Tennis, M. Philippe Bana, DTN Fédération Française de Handball, Président AS DTN, M. Pierre Berbizier, ancien sélectionneur de l’équipe de France de Rugby, M. Patrick Patureau, Responsable Sport, groupe HEC, M. Jean-Pierre Doly, Consultant en management, Directeur Doly&partners
Intervention de Jean Pierre Doly
Le constat > l’entreprise et le monde sportif : un étonnant paradoxe
D’une part certaines entreprises investissent dans le sport (sponsoring) ou invitent à leurs conventions certains champions, athlètes, joueurs, coachs en activité ou retraités, mais très peu appliquent des méthodes d’organisation ou de management/RH de leur propre entreprise et encore moins recrutent des sportifs de haut niveau en reconversion ou fin de carrière …
D’autre part un monde du sport méfiant vis-à-vis du monde de l’entreprise prétextant des stratégies, organisations, management différents…
En fait il y a un même process théorique d’organisation mais des réalités et des quotidiens il est vrai totalement différents voire opposés…
Et pourtant il y a une même finalité : le RESULTAT, la PERFORMANCE
Et des process de management pour obtenir ces performances et résultats qui se rejoignent : une vision claire et partagée, une stratégie ambitieuse et réaliste, une équipe professionnelle et motivée, une forte culture commune…
Mais l’entreprise –même performante- manque souvent d’âme, de réactivité, de rapidité, de courage , de sens, d’humanité, de plaisir…et le club sportif ou la Fédération – même performants- sont souvent confrontés à des difficultés d’organisation, de choix et management des talents, de gestion des ressources humaines, d’anticipation ou de développement dans la durée…
Alors, pourquoi ne pas rapprocher davantage les points forts des uns et des autres ?
L’entreprise peut apporter au monde du sport ses compétences en stratégie , sa vision, son projet décliné en politiques, stratégies, plans, systèmes de pilotage avec des indicateurs et outils d’analyse , de reporting, de communication…et aussi la gestion des ressources humaines dans la durée( recrutement, sélection, détection et développement de talents, formation, évaluation, rémunération, gestion de conflits, licenciements…) sans oublier la cohérence et crédibilité économique et financière.
Le sport ou les sportifs peuvent apporter à l’entreprise le leadership, la mobilisation sur des objectifs précis, quantifiés, datés, l’esprit de compétition , la prise en compte de stratégies des concurrents, des adversaires , la préparation tactique, technique , physique et psychologique d’un challenge , les valeurs humaines de réussite par l’équipe , le groupe, la solidarité, la coopération, la complémentarité, la diversité, les interactions entre acteurs, …le plaisir !
5.4 Sport & Management : comment manager le haut niveau ?*
« Quand tu veux pouvoir tout demander aux gens, tu dois aussi tout leur donner, la réussite ne passe pas que par la bonne touche ou la bonne mêlée, elle repose aussi sur cette bonne ambiance de travail ;par exemple il ne faut pas tromper les joueurs, même pas une fois, sinon ils ne t’écouteront plus jamais….quand on a des mauvais passages, il y a une remise en question de certaines choses, mais on ne met pas la faute sur le président, l’entraineur ou les joueurs ;nous sommes tous concernés, s’il y a parfois des remises en question, c’est toujours avec une volonté d’avancer ensemble…..L’important n’est pas le porteur du ballon , mais tous les éléments autour ce qu’on appelle le jeu sans ballon, c’est cette fameuse « intelligence situationnelle » qui laisse la liberté du jeu, du placement et de l’initiative au joueur en fonction de ce qu’il constate sur le terrain…il a la liberté d’entreprendre, le droit à l’erreur et une capacité d’analyse de la situation, nous considérons que ne pas prendre d’initiative est plus dangereux que de prendre un risque inconsidéré ! » (Guy Noves Manager Général de l’équipe de rugby de Toulouse)
S’il est assez fréquent que d’anciens sportifs ou entraîneurs de haut niveau aillent faire part de leur expérience dans des séminaires de cadres ou conventions de vente, en revanche peu de patrons vont faire part de leur expérience de manager d’équipe de « hauts potentiels » voire même échangent avec les coachs de haut niveau.
Et pourtant y a t il de si grandes différences entre le management d’une équipe de professionnels de football à un haut niveau européen ou mondial et l’animation d’un comité de direction d’un groupe multinational ?
N’y a t il pas un certain nombre de ressemblances dont les uns et les autres –en les détectant et les précisant- pourraient tirer un efficace profit ?
Ayant la chance de pouvoir « graviter » dans ces mondes à priori assez éloignés depuis plus de 30 ans, c’est avec plaisir que nous proposons une rapide grille de lecture des principaux points communs permettant une comparaison pour action.
Un entraîneur, un coach, un PDG exercent un métier assez particulier qui s’apparente à un chef de projet : il doit prévoir et anticiper des objectifs précis, coordonner et animer le travail d’un staff de spécialistes de haut niveau et être en même temps un homme de terrain capable de prendre les décisions qui s’imposent en temps réel.
Un coach responsable du haut niveau doit être capable de concevoir et de conduire un projet d’accession à la performance et ce de façon durable. Il lui faut certes la compétence, l’expertise, le charisme, le pragmatisme mais surtout cette capacité si particulière de conduire un groupe, une équipe vers un projet commun en gérant les paradoxes, contradictions, conflits éventuels tout en gardant une vision claire de la stratégie et du projet.
Les qualités requises
1. Fixer des objectifs
Il y a tout d’abord la capacité à créer une cible claire , ambitieuse , la capacité à fixer des priorités ,à organiser ,à mettre en œuvre les changements nécessaires ,à suivre et obtenir des résultats ; pour cela il faut certes connaître et comprendre e n profondeur son « marché » , son « business » ,ses « concurrents » ,il faut être en permanence à l’écoute de tout ce qui se dit ,se fait ,se crée ,se passe pour en faire son profit mais il faut surtout avoir cette envie ,cet espoir , cette flamme ,cette dynamique ,cet enthousiasme sans lesquels tout but , toute aspiration tout objectif a atteindre serait vain.
Il s’agit de parvenir à définir ses priorités, les dire, les partager, les faire comprendre et se donner les moyens d’agir : pour cela il faut définir clairement les objectifs avec la bonne motivation en évitant doutes et complexes et en éliminant conflits potentiels.
2. Atteindre son meilleur niveau/ Aller au bout de son potentiel
Etre capable d’expliquer, de communiquer clairement sa vision globale du sport ou de l’entreprise pour aider les membres de l’équipe à donner le meilleur d’eux mêmes, à faire l’effort supplémentaire.
Etre capable par un savant mélange de langage technique et émotionnel de motiver, d’entretenir la passion, de transformer une carrière ordinaire, banale, rectiligne en une véritable aventure permettant de tutoyer les sommets.
Etre capable d’utiliser toutes les compétences pour amener chaque membre de l’équipe à son meilleur niveau et ce pour tous les postes.
Etre capable de reconnaître et faire reconnaître l’étendue et la limite de ses talents.
Etre capable de créer chez chaque membre de l’équipe l’envie d’aller au bout de lui même pour les autres, pour l’équipe.
Etre capable d’utiliser le sport ou l’entreprise pour apprendre à mieux se connaître et développer ses capacités, ses potentialités, ses atouts en étant honnête avec soi même, en ne trichant pas et atteindre ainsi un niveau supérieur à celui dont on s’estimait capable avant d’entreprendre une carrière sportive ou professionnelle.
Etre capable de se servir de son activité comme une expérience de vie au delà même de la notion de succès ou d’échec.
Etre capable de contrôler son anxiété, gérer le stress, maîtriser les émotions, canaliser l’agressivité.
Etre capable d’analyser rapidement les qualités et défauts, forces et faiblesses de son adversaire (concurrent) pour exploiter ses défauts et faiblesses.
3. Privilégier l’équipe, le collectif
Par l’anticipation, la prévision, la simulation, le collectif pallie l’absence, la défection, la blessure.
L’expérience durable est préférable aux coups (de cœur éphémères !), pour cela il faut d’abord définir les fonctions, missions, rôles de chacun, les faire connaître et accepter et aussi bien se connaître et se respecter pour pouvoir vivre et travailler ensemble.
Le groupe se rassemble autour de représentations symboliques communes, partagées avec efforts et sacrifices consentis dans une grande et indispensable solidarité.
L’équipe compte davantage que les individus : cumuler un certain nombre de talents personnels ne crée pas nécessairement la synergie et ne garantie pas l’efficacité car l’équipe est la source, l’esprit qui donne à l’un ou l’autre des ressources qu’il n’imaginait pas.
Le coach manager doit protéger l’énergie vitale interne du groupe, les seules personnes qui comptent sont celles du groupe, toute personne étrangère n’a rien à faire en interne, c’est pour cela que parfois il est utile d’avoir la culture du camp retranché en interne.
La communication doit être clairement définie et portée par le coach, c’est ainsi que parler à l’extérieur du groupe est une trahison : l’esprit de corps vient du fait de ne pas pénaliser l’ensemble par la maladresse d’un seul.
La valeur de l’exemple est primordiale, l’influence positive ou négative d’un membre peut être déterminante, il ne faut pas hésiter à se séparer « d’une grande gueule »talentueuse, d’une forte personnalité mais trop individualiste qui pourrait ruiner le collectif. L’équipe (l’entreprise) joue (travaille) pour elle : toute personne qui trahit, qui salit, qui porte atteinte à l’authenticité qui entrave la bonne marche de l’équipe doit en être exclue.
4. Avoir le droit à l’erreur/apprendre des échecs
La défaite est une grande source d’inspiration pour progresser, il faut bien sûr envisager l’échec, en accepter et assumer le risque. Il n’y a pas de victoire possible sans droit à l’erreur (pas partout, pas tout le temps).
Il est important d’accepter de travailler dans le stress, de prendre des risques, de garder la confiance malgré les passages à vide, les tolérer et comprendre et savoir se remettre en cause régulièrement, déranger, provoquer (par exemple la soif de revanche).
Enfin gagner oui ! mais pas à n’importe quel prix (avec éthique, sans dopage ni corruption…..)
5. L’entraînement et la formation sont essentiels
La préparation d’une stratégie, d’une tactique est importante mais ne peut pas tenir compte à 100% de l’adversaire, du concurrent.
La constitution et la préparation de l’équipe sont essentielles pour réussir une action, une performance collective, mais même avec une stratégie adéquate, la performance peut ne pas être au rendez vous s’il n’y a pas eu préparation.
L’acquisition de techniques, d’expériences –source d’amélioration de la performance- est progressive et nécessite de se conformer à des paliers, des cycles, des acquisitions adaptés à l’équipe voire à chaque membre.
L’entraînement est primordial, c’est lui qui prépare la compétition et la performance pour « connecter » le joueur avec les règles et les joies du jeu et le salarié avec le fonctionnement de base de l’entreprise et le plaisir de travailler en équipe.
Faire des efforts pour faire des efforts n’existe pas, travailler dans la joie, accomplir des rêves, se concentrer sur son énergie, rechercher la perfection : oui !
5.5 Les preuves d’un travail d’équipe
Le groupe doit établir et communiquer les plans du produit du projet de travail collectif de manière explicite.
Les membres de l’équipe doivent répartir la fonction de leadership, alterner le rôle de leader en fonction des tâches à réaliser et se sentir solidairement responsables des résultats du groupe.
Le produit d’un travail d’équipe est le résultat auquel arrive un groupe en utilisant les différentes compétences pour produire un meilleur résultat qui serait atteint si chaque membre du groupe travaillait individuellement, en ce qui concerne des équipes de haut niveau, cette méthode est rare mais très utile par exemple lorsqu’il y a crise et donc urgence.
*Extrait du livre L’accordeur de talents – Jean Pierre Doly – (Dunod 2012)